La libération de Metz par le Général Denis
Fin août 1944, la situation de l'armée allemande en France était
fort compromise.
Après avoir " piétinés " en Normandie du 6 juin
à fin juillet, les Alliés " foncèrent " vers
l'Allemagne.
La 3e Armée américaine de Patton, en tête, exploitant facilement
vers l'est, avait libéré au passage Paris et avait atteint la
Meuse le 1er septembre. D'autre part, à partir du 17 août, la première
armée allemande retraitait de la côte atlantique vers le Nord-est
et la 10e armée de la côte méditerranéenne vers le
Nord.
Optimistes, les Alliés voulaient atteindre au plus vite le Rhin, Patton
notamment, voulant oublier l'existence de la Moselle, de Metz, et de la ligne
Siegfried. Or Metz, important carrefour et base logistique régionale,
protégée par une ceinture fortifiée, était un objectif
impératif.
Mais une inévitable panne de carburant stoppa les américains à
partir du 1er septembre. Elle était due à des besoins énormes
et aux difficultés de ravitaillement à partir de ports de plus
en plus éloignés et d'itinéraires venant d'être fort
endommagés par les assaillants eux-mêmes. Or, cet arrêt inattendu
permit aux Allemands d'améliorer leur mise en défense trop tardive.
Quelques unités sarroises et d'autres, prélevées sur les
troupes refluant de l'Ouest - dont la 17e Panzer Grenadier Division SS - vinrent
renforcer les effectifs locaux dont l'essentiel, à côté
d'une 462e Division de campagne peu opérationnelle, était le Régiment
de cadets fait de combattants aguerris qui s'accrocha aux forts ouest de Metz.
Le 5 septembre, les pleins refaits, Patton reprit son offensive, mal renseigné
mais continuant de vouloir " foncer " jusqu'au Rhin. Face à
Metz, sa 7e Division Blindée fut vite arrêtée par la ligne
d'ouvrages espacés des forts Canrobert à Driant. La 5e Division
d'Infanterie US dépassa alors les blindés et s'efforça
de déborder cette résistance par le Nord et surtout par le Sud.
Là, la Moselle est atteinte le 7 près de Dornot et, toujours pour
" foncer ", une section tenta le franchissement aussitôt. Elle
fut refoulée. Mais des erreurs de transmission firent croire au commandement
qu'une tête de pont venait d'être créée. Le 11e Régiment
d'Infanterie US reçu donc l'ordre de passer en force le 8. Ce jour là,
quatre compagnies franchirent la rivière et deux d'entre elles progressèrent
vers leur objectif : le fort Saint Blaise. Elles purent atteindre les défenses
extérieures de cet ouvrage mais butèrent alors sur un ensemble
de barbelés, de murs, et de fossés. Elles durent refluer vers
le " Bois du Fer à Cheval ". Et c'est alors, sur cette zone
dégagée, qu'elles furent prises à partie par des feux violents
et des attaques menées sur leurs deux flancs par des éléments
de la 17e Panzer Grenadier Division SS. Peu d'hommes rejoignirent le bois et,
renforcés, s'y défendirent jusqu'au 10 malgré de lourdes
pertes. Cette mission de sacrifice était voulue pour fixer l'attention
de l'ennemi alors que le 10e Régiment d'Infanterie US préparait
un nouveau franchissement plus au sud, plus important, mieux préparé
et moins menacé par des tirs directs ennemis.
L'échec du 11e R.I. lui avait couté la perte de plus de la moitié
de ses effectifs engagés, quelques 945 tués, blessés et
disparus
Du moins, ces pertes ne furent pas inutiles.
Le 10, un nouveau franchissement fut réussi à Arnaville par le
10e Régiment d'Infanterie disposant d'appuis plus importants (artillerie,
aviation, écrans fumigènes). Le lancement d'un pont fixe permit
la traversée le 12 par le Combat Command B de la 7e Division Blindée,
renfort qui facilita la prise de la crête dominant de l'est le fleuve
puis l'élargissement de la tête de pont.
Ce succès poussa alors, le 14, le 20e Corps US à planifier l'encerclement
de Metz, la 7e Division Blindée et la 5e Division d'Infanterie, débordant
la ville par le sud alors que la 90e Division d'Infanterie attaquerait, elle,
de Thionville vers le Sud-est.
Jusqu'au 18, les Américains s'emparèrent du plateau de Lorry,
entre Moselle et Seille jusqu'à la crête boisée qui, de
l'ouest, domine la Seille. Le 20, ils attaquèrent les villages de cette
vallée, de Sillegny à Pournoy-la-Chétive mais, contre-attaqués,
durent se replier sur cette même crête boisée.
Mais les GIs se battaient depuis juin
Il leur fallait " souffler
" et se réorganiser. Ce fut " la pause d'octobre ", tout
en préparant la reprise de l'offensive avec les mêmes objectifs
: faire sauter le verrou messin et atteindre le Rhin au plus vite.
Le débordement sud de Metz restait entravé par le fort Driant
tenu par les Cadets allemands. Le 11e Régiment d'Infanterie US y connut
alors un triple échec que Patton ne " digéra " pas,
mais qui ne put empêcher le succès final. Metz fut effectivement
encerclé mi-novembre, puis libéré le 22 par des actions
convergentes des 5e et 95e Divisions d'Infanterie US.
Dès lors, ce fut l'offensive générale lancée à
la rencontre de la déferlante soviétique, cette fois sans arrêt
jusqu'à la capitulation de l'Allemagne nazie le 8 mai 1945.
Général Pierre
DENIS, écrivain-historien.